Depuis 2 ans, Digitall Makers (moi donc) suit avec attention les évolutions de la Blockchain publicitaire. Révolution ou feu de paille pour une industrie qui se cherche encore ? J’ai eu l’occasion d’exposer une partie des travaux au cours sur séminaire de l’IREP / CESP / IAB France le 20 juin 2018. Le thème était sur la Transparence et l’efficacité, état de l’art et innovation sur le marché. Quelques éléments de mise en bouche sur ma vision des innovations dans la Blockchain publicitaire.
Malvertise et Adblocking
Une situation de marché favorable à un changement radical. En effet, l’encombrement du marché publicitaire pour les internautes a certainement atteint un point de non retour (Malvertise). Le contrat de lecture historique de la publicité a été submergé par l’industrialisation à outrance du marché. Des formats trop intrusifs, trop présents qui viennent cacher un contenu parfois un peu bas de plafond, ont favorisé un terrain « Anti-Pub ». Les adblocks sur desktop ou sur mobile sont en train d’enterrer une publicité digitale, petit à petit, vielle de 20 ans. Un prétexte pour voir émerger une autre manière de gérer la publicité…et les revenus tant indispensables à la qualité des contenus des éditeurs.
Fraude et manque de transparence : Catalyseurs des maux
La fraude sur le marché publicitaire est un fléau qui gangrène l’industrie. Il ne peut y avoir plus mauvaise presse que de dire que la fraude publicitaire est devenu une activité mafieuse, tant le détournement des investissements publicitaires est quasi » sans risques » pour les contrevenants. Les alertes d’IAS et des autres outils, experts en la matière sont pourtant nombreuses. C’est environ 7 Milliards de $ en 2016. Mais les chiffres sont difficiles à évaluer à ce jour tant la diversité des systèmes de fraudes publicitaires sont importants et créatifs.. Mais les chiffres sont forcément en croissance selon tous les observateurs du marché.
Si on rajoute l’opacité et la consanguinité des mécaniques publicitaires favorisées par l’achat programmatique, on arrive à une situation qui conduit l’industrie à se poser de vrais questions sur le devenir du modèle à terme. les chiffres de croissance de la programmatique par le SRI cache une grande disparité des acteurs et des revenus que l’on peut en tirer (Facebook étant intégré dans l’analyse de l’achat programmatique). Les éditeurs sont « obligés » de combiner plusieurs outils (SSP, DSP), plusieurs techniques (header bidding, First auction) pour tenter d’obtenir des revenus au niveau de leurs attentes.
Si on devait résumer le mal du marché face à ces situations, on parlerai de déficit global de la CONFIANCE. Valeur indispensable dans les relations commerciales et publicitaires.
Comment alors la technologie Blockchain peut-être une solution pour le marché publicitaire digital ?
Le token, nouvelle unité de valeur pour le marché.
Un actif numérique pouvant être transféré (et non copié) entre deux parties sur Internet, sans nécessiter l’accord d’un tiers. Lorsque le token est transféré d’un acteur A à un acteur B, le mouvement est inscrit sur une blockchain en tant que transaction, de façon transparente. C’est ce que propose le modèle des crypto-monnaies. Le token permet d’inscrire tous les éléments de la chaine de valeurs. Dans le marché publicitaire, ce n’est plus seulement l’impression publicitaire qui est la valeur marchande. On y inscrit d’autres données qui sont liés aux conditions de diffusion et de monétisation de l’unité de valeurs. Le block ainsi constitué devient pérenne et il est réputé inviolable (même si ce n’est pas garantie- cf l’actualité du moment).
Ledger, une base de registre et de partage à la vue de tous.
Le partage est l’ADN du web. C’est un asset, comme on dit qui est un fondamental de cet écosystème. Il est donc logique que ce registre soit à la base de la configuration de la Blockchain. C’est le principe fondateur de la blockchain. La notion de registre consultable par tous est l’un des moyens au delà de l’encryptage des données en bloc, de pouvoir garantir la sécurité de ces derniers. La réplication de ces blocs permettent à la communauté (définie comme étant ceux qui sont dans ces logiques transactionnelles) de devenir le garant de la conformité des blocs ainsi minés. Le registre pourrait permettre d’avoir une « pige » fiable des actions publicitaires du marché et de la concurrence. Tous les éléments sont inscrits de manière irréversible. Ils peuvent cependant être corrigés par la communauté. La certification est garantie par le registre, gérée par la communauté référent au registre. Plus de posture centrale dans la conservation des données. Le système veille au delà de l’existence des protagonistes de la chaîne.
Les Smarts Contracts, IF…THEN…
il s’agit de programmes autonomes qui exécutent automatiquement les conditions et termes d’un contrat, sans nécessiter d’intervention humaine une fois démarrés. L’automatisation des flux publicitaires est en ligne avec les conditions des smarts contracts. Ils offrent l’avantage de garantir toutes les transactions dans la programmatique publicitaire. Il y a un gros intérêt pour les acteurs dans ce type d’élément vis-à-vis des règlementations en matière de data (GDPR & eprivacy). Ces programmes autonomes, une fois constitués sont des garanties d’applications des règles qu’il contient dans toutes les situations. Dans l’industrie publicitaire, le contrat d’achat d’espaces est souvent un élément clé de la négociation par les intermédiaires historiques du marché (sur tous les médias). En revanche, l’opacité des achats – reventes sur la partie programmatique ne permet plus une application exacte des dits contrats cadres. Les intermédiaires ne déclarant les investissements que sur leur nom d’acheteurs.
C’est comme si on demande le premier client à une régie qui à un SSP, elle vous dira que son client c’est Critéo (par exemple) et non Renault. Et même si Renault fait parti des achats programmatiques de Critéo sur le SSP de la Régie. Avec les smart contracts les conditions définies pourront quand même s’appliquer car elle seront définies en amont (ce qui n’est pas le cas de manière usuel sur le marché). Renault pourra consolider ses achats quelques soient les acteurs intermédiaires de la chaÎne de valeurs. Et comme toutes les transactions s’inscrivent dans le « LEDGER », il sera facile de ré-identifier toutes les dimensions des achats exécutés pour le compte de l’annonceur.
Dans les 130 crypto-monnaies crééent sur le marché, l’Ether et l’Ethereum semblent pour le moment tenir la corde dans les applications du marché publicitkaire. Cela ne veut pas dire que c’est LE système. Et on peut imaginer facilement que les développeurs ne seront pas en mal de créativité pour concevoir des systèmes plus complexes et panachés d’IA .
La théorie des 4T pour finir sur le Proof of Concept pour l’industrie publicitaire digitale
Si l’on doit synthétiser les principaux bénéfices de la blockchain publicitaire pour l’industrie, on peut résumer de la manière suivante :
Transaction : Le principe de retrouver une unité, qui a une vrai valeur pour ceux qui commercialisent une audience est un impondérable pour garantir un contenu de qualité, sans fake news. Pas mal de systèmes dans la Blockchain publicitaire ont redéfini un spectre autour d’un triptyque : Annonceurs, Editeurs, et Utilisateurs. Cela n’empêche pas les intermédiaires de se rémunérer (cela en limitera le nombre certainement) et cela introduit l’utilisateur dans la rétribution de la valeur déclenché par l’annonceur. En clair, l’internaute pourra percevoir une rémunération (Token) pour sont attention et son action publicitaire. Il pourra à sa guise intégrer dans son système de rémunération et/ou le réinvestir dans l’achat de contenu auprès de l’éditeur. Beaucoup de Tokens dans le monde applicatif de la blockchain publicitaire sont constitués d’ETHER sous L’ETHEREUM.
Tracking : La traçabilité est devenu un élément de base de toute l’industrie. Savoir où l’on est passé, où l’on va passer. Permettre aux protagonistes de la transaction publicitaire, acheteurs, vendeurs et toute la chaine d’intermédiaires est le meilleur garant pour ne pas perdre de valeurs. La capacité d’un registre des transactions et des actifs lisibles par la communauté active sur la blockchain est tout trouvée pour assurer cette tracabilité. C’est même un moyen irréfutable pour le marché de faire le point sur qui fait quoi dans la chaine de valeurs. Voire aussi de retrouver des preuves dans l’usage abusif de certaines données par certains acteurs sans rémunérer les propriétaires de la donnée. La fin du DataLeakage que beaucoup d’acteurs pratiquent dans leurs business modèles. Il en va de l’aspect PREMIUM revendiqué par beaucoup d’acteurs sur le marché et des placements réels et sérieux pour les l’annonceurs en mal d’efficacité sur le digital.
Transparency : Tous les actifs créés, modifiés sont inscrits dans la Blockchain publicitaire, sans compromis. C’est l’enjeu d’une transparence totale des actifs publicitaires. c’est certainement un point voulu par tous, mais sommes nous prêts à donner des informations stratégiques à la concurrence, ou à des acteurs tiers ? Cette transparence tant promise par la loi sapin pourra être appliqué sans détour, alors !
Trust : Le principe de la Blockchain publicitaire est de garantir une confiance entre pairs, sans centralisation des actifs. Quelques soient les acteurs et leurs poids dans l’écosystème c’est la communauté qui régit les principes de la confiance. Cela n’empêche pas un acteur tiers de participer à la certification, mais cela permet à tous les parties prenantes d’être au courant des transactions et de leurs légalités (dans le cadre défini par la communauté). Le DAT (Digital Ad Trust) du SRI, déjà inscrit dans la Blockchain grâce à InBlock pourra y trouver une véritable valeur marchande pour l’écosystème.
Voilà, ce que l’on peut commencer à analyser sur le sujet de la Blockchain publicitaire en juin 2018. Loin d’être une utopie c’est vraiment une opportunité à laquelle le marché publicitaire doit s’attacher pour son avenir. D’ailleurs on voit des annonceurs comme Unilever s’en pré-occuper sur cette partie sur le marché publicitaire.
Je reviendrai plus tard sur mon analyse des acteurs et des initiatives du marché. à suivre donc.